Evolution des mottes castrales

 

Château du XIVème siècle en Quercy

Le règne Capétien commençant, dont les pouvoirs sont très faibles, les Seigneurs remplacent leurs châteaux de bois par des édifices en dur qui suivent la tradition architecturale locale, pour renforcer leur domination sur les territoires qu'ils possèdent. Les guerres entre français et anglais ainsi que les croisades religieuses pousseront encore plus dans cette tendance.
Un des buts de ces châteaux (sur roc ou sur motte) est de montrer la puissance du Seigneur. Il y a alors une tendance à faire plus haut, plus beau, plus solide que le Seigneur voisin et rival. Une sorte d'ostentation.

Château et Eglise de Montfort L'Amaury au XIVème siècle

Parallèlement, le Seigneur aura tendance à se doter d'une chapelle ou d'une église à la hauteur de ses ambitions et de sa réputation. Mais il existe une rivalité entre la noblesse et le clergé. ne serait-ce que dans la perception des impôts. Alors, l'église sera construite dans la basse-cour dans le cas le plus courant, voire même loin du château. Pratiquement, l'église n'est perchée sur la motte que lorsque la terre est une possession du clergé et qu'elle en concède le bénéfice à un noble. Des siècles plus tard, lorsque les mottes seront délaissées parce que l'évolution des armes et de la poliorcétique les rendent inutiles et que les nobles construisent des châteaux plus grands, plus confortables, défendus par de hautes murailles qui demandent des fondations solides sur un sol stable et de grande surface, le clergé prendra parfois possession des mottes pour y construire l'église qui surplombe alors le village.

Lorsque le château de Rilhac Lastours a été reconstruit en pierre,
à 300m du château de bois d'origine, l'église a pris sa place en haut de la motte castrale

Par ailleurs, il y a un rôle fonctionnel évident à ces châteaux : nous sommes en plein cœur d'une période d'expansion agricole. Les déboisements, défrichements et dépierrages des terres qui vont être mises en exploitation doivent être surveillés et leurs acteurs protégés. Il s'agit d'une fonction première : le Seigneur a des droits sur ses serfs et les vilains, mais il leur doit protection. C'est un code moral qui est particulièrement surveillé par l'Eglise. Des vigies, occupant une position surélevée vont pouvoir prévenir les travailleurs de l'arrivée d'une troupe de brigands ou de soldats du Seigneur voisin qui conteste les frontières des possessions mutuelles.
On note d'ailleurs qu'une motte, de dimensions modestes, peut être édifiée pour surveiller et protéger un chantier distant et être ensuite arasée et mise en culture. Des prises de vues aériennes complétées de fouilles ont montré en divers lieux de plaine des zones annulaires correspondant à d'anciens fossés ensuite rebouchés, à faible distance d'une motte plus importante, comme une motte secondaire, complémentaire de la première, une sorte de redoute, un premier point de défense contre l'ennemi.
L'inversion des couches de terre modifie la fertilité des sols et permet de visualiser ces fossés par des coloris et des hauteurs de végétaux différents. Cette technique d'archéologie aérienne permet aussi de mettre en évidence des mottes de grande taille, anciennes seigneureries défaites et ruinées, dont le château a été réduit à zéro pour asseoir la puissance du nouveau Seigneur conquérant. Avec le développement des prises de vues détaillées par satellite, il est désormais assez facile de retrouver la trace de mottes dont on connait la localisation, mais qui ont disparu et sont invisibles depuis le sol.

Mottes arasées d'Ablaincourt, de Nantille, d'Ors-Malmaison et de Saint Pol sur Ternoise

Les historiens estiment que les mottes ont cessé d'être édifiées vers le XIIème ou le XIIIème siècle, suivant les régions, remplacées par les châteaux de pierres, permettant une meileure défense contre l'artillerie naissante.